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Grand Raid

Samedi 19 août 2017, de Verbier à Grimentz, Valais


1ère en 8:00:19

 


Comment diable mettre des mots ... ?
Le Grand Raid est pour moi chaque année l’objectif de ma saison. Passée en 2015 en dessous des 8 heures avec une deuxième place sur le grand parcours, il ne me manquait que la victoire.
En forme et plus prête que jamais, je suis détendue. J'ai tout fait au mieux. La pression ne monte vraiment que quand je réalise, 2 jours avant la course, qu'Esther Süss, grande favorite et de loin, ne prendra pas le départ. Parmi toutes les concurrentes, il y en a bon nombre que je ne connais pas, la plupart des étrangères. Celles-ci ne connaissent souvent pas la course et ne sont pas forcément les plus redoutables. Il y a par contre Cornelia Hug qui me bat régulièrement et Bettina Janas qui pourrait être dans un grand jour.
Du coup, je ne dors pas très bien. La journée du vendredi passe, entre la route, l'enregistrement à Verbier, la tournée des ravitailleurs, et un petit entraînement.
Nouvelle courte nuit, 3h30, je me lève. Je commence par le café et le déjeuner. J'espère avoir le temps de digérer avant 7h. Nous partons à Verbier avec mes parents. La tension est vive. Je sais que je peux gagner, que ce sera peut-être mon année. Dans ma tête, je m'attends à une course difficile. Je me vois faire tout ce que je peux pour rester dans la roue de Cornelia le plus longtemps possible.
7h, silence, coup de pétard, départ ...
Bettina et Cornelia sont juste devant moi. Je démarre bien, les jambes sont légères. Bettina doit ralentir. Comme prévu, je prends la trace de Cornelia. Elle-même se place dans la roue d'un autre concurrent, et nous montons. Rythme régulier, sans trop de difficulté. Au bout de quelques minutes, je m’intercale entre Cornelia et les garçons devant. Un autre groupe nous dépasse, je les suis. Cornelia aussi. Mais sont souffle commence à se faire entendre. Serait-il possible ? Je suis toujours très bien. Les gars accélèrent un peu, j'ai un peu de marge et parviens à les suivre. Après un moment, peu après Carrefour, je me retourne. Cornelia n'est plus avec nous. Elle est même déjà assez loin derrière. Quelle surprise, .. et que de perspectives :-) Mais la route est tellement longue. L'euphorie devra attendre.
J'avance ... les Ruinettes sont déjà là. Nous fonçons en groupe jusqu'à la Croix de Coeur. Benoît est au bord de la route, il saute de joie et sa bonne humeur est communicative. Tzoumaz, passage devant le chalet où les voisins m'encouragent, puis j'arrive chez Catherine. Elle est au taquet, et moi aussi. Les jambes redémarrent, je repars dardard, direction Veysonnaz. Toute la famille de Cédric y est au rendez-vous. Les filles me ravitaillent comme des pros, j'ai une première idée des écarts. Quelques minutes sur Cornelia, avec tendance à creuser. Puis c'est Thyon et Hérémence. L'échauffement est terminé. Les idées très claires, mais un peu galvanisée par ma position en tête, j'avance vite. Je sais que je prends des risques. Je suis à la limite du sur-régime. Mais bon, pour le moment ça tient, et ce n'est pas aujourd'hui que je peux me permettre de fonctionner à l'économie. J'arrive à Couta. Mes parents sont là, fidèles au poste, comme à chaque fois. Nous sommes un petit groupe de 3. Je lance un tout bon tempo. Ils suivent, nous nous relayons. Je sais que je suis en général très efficace sur cette portion de course. La route est régulière, à un pourcentage qui me convient parfaitement. Mais après 25 minutes de montée, je commence à sentir les premiers vrais signes de fatigue. Je m'accroche encore un moment, avant de devoir lever le pied une fois l'alpage passé. Depuis là, j'avance beaucoup moins bien. C'est une portion difficile qui me donne toujours l'impression d'être scotchée. Du coup, je ne panique pas et continue à pédaler. Partie technique du Mandelon, je m'en tire très bien. Je reprends des couleurs dans le plongeon vers Evolène et je rejoins Michael. Il m'apprend que j'avais 10 minutes d'avance au Mandelon. Enorme !!!!
C'est l'heure de redémarrer. Ca devient dur, mais je monte toujours correctement. J’atteins Eison, puis Henri et Simone en bas de la montée de l'A-Vieille. Un bidon, à manger, je repars ... ou au moins j'essaie. Les jambes sont out !!! Le début de l'enfer. J'appuie le plus fort possible sur mes pédales, j'ai le nez collé à ma roue, je ne vois rien d'autre que le mètre devant mon vélo. D'autres concurrents roulent un peu avec moi. De Verbier ou de Nendaz. Je regarde mon compteur, je devrais être à 9 km/h, je ne suis qu'à 7, même 6. Et là, je me rends compte que j'ai tout à perdre. Instant de déprime, envie de chialer, puis je pense à vous tous derrière vos écrans et vos télés. Vous m'avez promis que vous alliez souffler. Alors je m'appuie sur ce vent positif et j'y crois. Je pédale. Je n'avance pas. J'y crois. Je pédale. Je n'avance pas. J'y crois. Et j'arrive à l'A-Vieille. La vue en bas est dégagée. Je ne vois pas Cornelia. Il reste une chance. C'est à ce moment-là que je prononce ces deux mots qui ont fait trembler la Suisse Romande : "Je craque". Pour moi, une évidence depuis presque une heure, pour le reste du monde, un choc !! Je tire mon épingle du jeu dans la partie plus technique du pâturage et je vois enfin Damien. Je lui dis que je suis au fond du bac. Il me répond "C'est tout bon, maintenant je suis là !". Comment ne pas galoper après avoir entendu ça :-) Quelques rasades de thé chaud et petit à petit, nous atteignons le sommet. Avant de m'élancer dans la petite descente, il me promet qu'il ne voit pas Cornelia. Je le crois et je fonce. Je monte bien le basset. Ce sont les dernières 10 minutes où il faut vraiment crocher. A chaque tour de roue, je sais qu'elle a moins de temps pour revenir. Florence m'attend en haut. Elle coure, elle m'encourage, elle me rassure. 4 minutes de marge au Pas de Lona. Il doit m'en rester maintenant au moins 3. A moins d'une erreur, elle ne reviendra pas. Je fonce, je fonce, je fonce encore. Je connais la descente par coeur, je suis à mon affaire à 200% et je ne commets pas de bavure. Il reste un kilomètre, c'est tout droit. Quelque chose vient coincer mon dérailleur. Je vais trop vite pour regarder ce que c'est. Le vélo avance, je ne peux juste plus vraiment pédaler. Mais c'est sans importance, tant que je peux rouler. Le plat, je donne 3 coups de pédale, tout bloque. Je laisse aller, je peux repédaler quelques fois, juste assez pour me permettre de franchir les derniers mètres. La tente, le bruit, les gens, les caméras et Bernard. La suite, plus nécessaire de le raconter, vous l'avez tous vécu avec moi.
L'aventure d'une vie, des émotions incroyables. Je suis sincèrement fière d'avoir gagné. Ce succès est le fruit de 8 ans d’assiduité. Mais je suis surtout profondément heureuse d'avoir pu le faire avec et grâce à vous. Le bonheur est tellement plus beau qu'en il est partagé !!!! Merci à chacun

Florence Darbellay remporte le Grand Raid 2017


Préparation pour le Grand Raid

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