1ère étape, 5 juin : Corcelles
Une montée, quelques coup de cul et beaucoup de plat. Voici en gros le résumé de l'étape du jour. De quoi se remettre pleinement dans l'ambiance de la Raiffeisen Trans. Avec bonheur :-)
Marine, tenante du titre, vient d'être Maman et ne sera pas présente cette année. Pauline est inscrite, Christelle Baumann et sa soeur Lisa ne le sont pas mais pourraient tout de même être au départ. Quoi qu'il en soit, je suis confiante et prête à batailler pour retrouver mon titre.
A 19h10, je me rends sur la ligne. Les Baumann ne sont pas là. Dommage. Mais il y a toutes les autres concurrentes à battre et la jeunesse se fait chaque année plus menaçante. Nous nous élançons dans la seule grande montée du jour. Les écarts commencent à se creuser après une centaine de mètres. Pauline mène le bal, suivie de Naïka et Elina (une toute jeune athlète prometteuse). Je suis juste derrière. Je maintiens le tempo et prends petit à petit les devants. Pauline reste dans ma roue. Je l'entends souffler, presqu'aussi fort que moi. Nous sommes toutes les deux dans le dur. Je sais que je dois faire la différence dans la montée. Après, dans le plat, ce sera beaucoup plus difficile de me détacher. J'attaque une première fois ... elle tient ... je me rassieds. Deuxième accélération, rien à faire. Je continue ... encore ... et encore. Après 5 ou 6 tentatives, les changements de rythme finissent par l'user et je parviens à m'échapper à quelques centaines de mètres du sommet. J'y fous grave, jette deux coups d'oeil derrière, vois que le trou s'aggrandit et m'élance à fond dans les 15 kilomètres restants. Je rattrape quelques messieurs du groupe de devant, reste avec un moment, avant de repartir à l'assaut du chemin. J'arrive peu à peu à rejoindre Jérôme. Il est puissant et c'est avec bonheur que je peux me câler derrière lui dans les portions roulantes. C'est aussi ça la trans. Savoir anticiper, être malin, voir loin et s'entraider suivant les objectifs, les capacités et le terrain. C'était aujourd'hui ma 46 étape. Autant vous dire que j'ai de l'expérience à ce petit jeu :-) Et au fil des années, je me suis rendue compte que pour la gente masculine, c'était plutôt motivant de rouler avec une dame. J'en ai vu bon nombre se transcender et finir par me remercier !! Comme ça, au final, tout le monde est gagnant.
Et aujourd'hui, à force de rouler à fond sans réfléchir, je termine avec 2 minutes d'avance sur les autres dames. Un coussin confortable pour aborder les prochaines étapes serainement. Prochain épisode aux Ponts-de-Martel. Avec j'espère autant de chance que ce soir avec le météo. Pas une goutte !!!
2e étape, 12 juin : Les Ponts-de-Martel
Deuxième mercredi de la série, et je retrouve avec plaisir mon maintenant traditionnel maillot jaune. Je dois avouer qu'avec les années, je m'y suis bien habituée. Ils sont d'ailleurs devenus bien plus saillants et confortables (cf les deux dernières photos en-dessous qui datent de ma première Trans en 2010) :-)
Comme la météo de ces derniers jours était pourrie, je décide de faire la reconnaissance juste avant la course. Dernier en-cas à 16h, avant de partir découvrir la boucle du soir. Du plat, une bosse, de la boue, une deuxième bosse et retour. Plutôt longue et assez variée, sans difficulté majeure, elle promet d'être chouette.
De retour vers 17h30, je lave mon vélo, me change de pied en cape et remonte sur mon rouleau pour 30 minutes d'échauffement un peu plus musclé. 19h : dernier préparatif, 19h10 : sur la ligne, 19h16 : c'est parti.
Le tracé commence par 5 kilomètres de plat. En théorie, ce sont les tandems qui devraient mener le bal. Après à peine quelques mètres de course, le premier prend les devants. Ni une ni deux, l'équipe Jérémy-Emilie répond et se place à l'avant du peloton. Les deux soeurs Baumann étant présente ce soir, je sais que la lutte va être rude. Je suis donc attentive et reste vers le devant du groupe. Tout le monde est là, je le sens, je l'entends et c'est super sympa.
Toute bonne chose ayant une fin, nous atteignons vite la première bosse. Je ne connais pas le niveau actuel de Chrystelle et Lisa. Je décide donc d'attaquer direct pour voir. Je dépasse le tandem Jérémy-Emilie et poursuis mon effort. Les deux soeurs tiennent bien le coup. Je dois tenir le tempo un long moment et accélérer à plusieurs reprises pour les voir céder. Au sommet de la montée, j'ai environ 15 secondes d'avance, que je parviens à maintenir dans le marécage qui nous fait replonger dans la vallée. Je donne mon maximum sur la longue montée suivante. Je tiens, mais l'écart ne cesse de diminuer, si bien qu'au sommet, travaillant en équipe, elles parviennent à revenir dans ma roue. Tout est à refaire !! Flûte ! Et comme j'ai grillé des cartouches, la tâche sera difficile. Surtout qu'elles s'entendent à merveille.
Leur travaille de sape fonctionne et je perds quelques mètres. Je reviens, je reperds, elles loupent une bifurcation, je reviens, une montée, je lâche une nouvelle fois. Je fatigue de faire l'accordéon. Il reste 6 kilomètres. Je pense soudain à ma prochaine course, un marathon important, qui a lieu dans 36 heures. Et je finis par renoncer. Ce soir, elles étaient trop fortes et finissent avec 45 secondes d'avance. Mais je ne regrette rien. Cette lutte énergique et sympathique m'a permis de creuser l'écart pour le général.
Revanche dans une semaine à Bevaix. Sur leur terrain, je ne pars pas favorite, mais tout reste à faire :-)
3e étape, 19 juin : Bevaix
D'un mercredi à l'autre, je ne vois pas passer les jours. J'ai bien récupéré de mon marathon de vendredi et j'ai ce soir une revanche à prendre :-) Attention Jeunesse !!!
Malgré cela, je ne suis pas super confiante. Les Soeurs Baumann sont fortes, elles ont plus que moi l'habitude de courses courtes et elles connaissent ce coin de forêt comme leur poche. La première montée étant assez en début de parcours, il faut que j'aie une belle avance au sommet pour espérer tenir les 10 kilomètres restants. En tout cas, je suis motivée à essayer !!!
19h16, je loupe complètement mon départ. J'oublie que ça part en général très vite, me fait suprendre et me retrouve larguée à l'arrière du premier groupe. Je fais mon possible pour revenir sur le premier tronçon en herbe et je recolle vaguement dans une descente goudron. Je suis encore assez mal placée lorque Chrystelle dérape dans un virage et entraîne sa soeur et Carole dans un agglomérat de vélo. Tout le monde se relève vite et sans mal, mais suite à ça, je retrouve une bonne place dans le groupe.
Encore un peu de plat, nous prenons la roue du tandem Jérémy/Emilie. Quel tempo :-). Les premiers kilomètres sont couverts et je suis bien. Maintenant ... la bosse. Je ne réfléchis pas. A peine le virage terminé, j'attaque. Sur mon vélo semi-rigide tout léger, je me dis que j'ai une chance de lâcher tout le monde directement. Debout sur mes pédales, je donne tout. En 20 mètres, je fais le trou. Personne dans ma roue. Mais le scénario étant le même que la semaine passée, pas de quoi se réjouir encore. Je me rassieds et ne pense plus qu'à une chose, viser le sommet en appuyant le plus fort possible sur mes pédales. 20 mètres, 30 mètres, 50. Je vois Bernard au bord de la route. Il m'encourage et me confime que j'ai un bon rythme. Je continue ... C'est long, mais un jour ce sera fini :-) Il n'y a qu'à tenir jusque là. Et je tiens. Je reviens sur plein de gars du premier groupe. Je souffle comme un boeuf et ils m'entendent arriver de loin. Il m'encouragent tous et c'est vraiment génial. 10 minutes d'un longue montée sur le goudron et j'ai fait un joli trou
Il y a maintenant du plat descendant, quelques relances, des singles, des bouts droits dans la forêt. Rien n'est fait. Je me lance à fond dans la bataille et vais tout faire pour garder mon avantage. J'appuie, plus fort, gueule un peu quand ça fait trop mal, et continue. Je vais vite, je le vois, et c'est grisant. Signal des 5 kilomètres restants. Il reste une belle montée, que j'attaque, sachant qu'elle a trois paliers et que si je ne craque pas, le plus dur sera fait. Je serre les dents, souffle encore plus fort ... 3 kilomètres, des singles descendants ... personne derrière, reste à éviter la faute, ... 2 kilomètres, c'est plat, ça va vite, ... 1 kilomètre, toujours personne, ... Dernière petite montée, c'est probablement fait mais je ne prends pas le risque de réfléchir et poursuit mon effort dantesque jusqu'au moment ou je lève les bras sur la ligne d'arrivée, super heureuse et fière d'avoir su et pu aller au bout de moi-même. Et comme marathonienne, je dois avouer que c'est assez sympa quand ça ne dure que 50 minutes :'-)
Un tout grand merci à Chrystelle et Lisa de m'avoir pousser dans ces retranchements. Les émotions sont belles.
Et bravo aux organisateurs pour ce très joli parcours. A refaire !
4e étape, 26 juin : Rochefort
Une étape courte et nerveuse, sous une chaleur intense. Mais dans la forêt après 19h, nous sommes bien. Les soeurs Baumann ne sont pas là ce soir. Dans ma tête, je m'attends à devoir un peu moins batailler. Mais ce n'est pas pour autant que je prends les choses à la légère. C'est bien connu, pour gagner la Trans, il faut être à l'arrivée de chaque étape.
Après mon échauffement habituel de 45 minutes, je me rends au départ. Nous nous élançons en montée, je suis aux avant-postes et je câle mon tempo sur celui de Naïka et de Dounia. Une petite descente glissante avant de nous engoufrer sur les chemins blancs au dessus de Montmollin. Le tandem Jérémy/Emilie prend les choses en main dans cette portion roulante. Le rythme est relevé, mais j'ai un poil de marge et me permet d'accélérer dans la deuxième montée du tracer. Carole tient le coup, les autres sont un peu plus loin. Je fais ma course, roule bien, tournicotte avec plaisir. Carole n'est jamais loin. Elle parvient même à revenir lorsque je suis dans un single avec un gars en gravel (chapeau à lui, il s'en sort à merveille) et nous faisons un bout du retour ensemble. Je lâche définitivement les chevaux dans la dernière longue montée raide. J'y mets tout mon coeur et m'élance dans la descente vers l'arrivée avec une demi minute d'avance. Largement assez. A moi de gérer la semaine prochaine mes 7 minutes d'avance au général. Il y a eu pire :-)
5e étape, 3 juillet : Le Quartier
5e étape en 2019 et 50e de ma carrière. Quelle chance ! 10 ans de vélo sans gros pépin de santé, sans lassitude de longue durée, sans rien qui me force à arrêter.
C'est le coeur léger, avec une marge plus que confortable, que je me suis lancée dans cette dernière étape. Lendemain d'un long entraînement de plus de 4 heures, mes jambes ne sont pas très fraiches et la pompe est un peu fatiguée, mais ça ne devrait pas poser de problème pour le général. Et si je peux gagner ma 28e étape, je ne dis pas non :-)
Nous partons de vive allure sur une longue portion de route plate, moulinant toutes comme des bêtes pour essayer de rester avec les tandems. C'est limite, il me manque une ou deux dents, mais je m'en sors. Première montée, je câle un peu. La mise en route est difficile. Ce n'est pas très raide, mais le tandem Jérémy/Emilie avance à un rythme d'enfer. Carole, Naïka et Stephanie sont dans leur roue. Je dois absolument tenir pour ne pas me retrouver seule dans le plat. Je m'arrache et résiste. Sommet de la bosse, puis du plat, le tempo ne rallentit pas. Il n'y a plus que le tandem, Carole et moi. Je croche, je souffle, je crache, je croche, ... je sais que ça finira.
Enfin les montées raides de la deuxième moitié de parcours. L'aspiration ne joue plus de grand rôle et je peux prendre mon rythme. Carole part un peu devant. J'arrive heureusement à la garder en visuel. Petit à petit, je lui grignotte même du terrain. Je bascule dans la dernière descente environ 10 secondes derrière elle, et j'ai encore bon espoir de pouvoir revenir. Moitié de la descente, j'ai refait mon retard. Epingle à cheveux suivante, je la passe, long bout droit qui tappe fort, je prends même de l'avance. J'arrive en bas quelques secondes avant elle. Il reste 100 mètres difficiles dans un chant. Je donne tout, traverse la route, elle est dans ma roue, j'y crois, j'appuie le plus fort possible, j'entends son souffle dans mon dos, deux virages, ils sont serrés, je garde la corde, ... 10 mètres, debout, la ligne, c'est gagné !!! Quel duel.
Merci Carole pour cette belle passe d'armes. La prochaine aurait été pour toi. Mais il n'y a que 5 étapes :`-) En 2020 certainement.
Après ça, tout passe très vite. Journalistes, décrassage 30 minutes en prévision de la MB race de samedi, douche et c'est l'heure des podiums. Je retrouve tous les copains et Bernard au manège pour les résultats. Et c'est à ce moment que mon coach de toujours sort une bouteille de champagne ... En l'honneur de la Trans, en l'honneur de ma 10e. Je suis déjà touchée. Mais ce n'est rien en comparaison des larmes que je verse 10 minutes plus tard, lorsque je ressois le plus beau des maillots jaunes, signés de tous, pour moi ... simplement ... pour moi. Je n'en reviens toujours pas.
Mes amis, MERCI
